Des bruits de toux, des pleurs, des sanglots. Des cris de désespoir, de rage, d’agonie. Des corps trop nombreux collés les uns aux autres. Il est dur de s’endormir au milieu de ce vent de misère permanant. Mais on s’y habitue peu à peu. Les microbes se transmettent avec aisance. Parfois une odeur de pourriture surplombe les odeurs habituelles de transpiration et de maladie : quelqu’un est mort pendant son sommeil. Alors on l’emmène ailleurs jusque qu’à ce qu’un autre ne se réveille plus.

Dans de grands idéaux ce lieu était destiné à permettre aux habitants du secteur 13 d’avoir une hygiène correcte. En théorie du moins. Le ménage ne semble jamais y être fait et le carrelage trempé a peu à peu pris la couleur marron de ce mélange d’eau et de saleté. L’eau qui s’écoule des douches, lorsqu’elle veut bien se manifester, est d’une couleur étrange dont on doute de l’origine, on se sent souvent plus propre avant d’y être allé. L’odeur d’urine qui se dégage des toilettes prend la gorge de ceux qui s’y rendent mais n’ont d’autres choix. La plupart des loquets ne ferment plus, si avant sanitaires rimaient aussi avec intimité ce n’est plus le cas et sans un ami pour se protéger se rendre ici c’est exposer son corps aux autres.

Dans les couloirs peu éclairés on trébuche parfois sur des corps, certains ne trouvant plus de place aux dortoirs ont en effet décidé de s’installer dans les corridors du vaisseau. Un marché noir s’est développé un peu partout dans ces coins peu recommandable de l’arche, il suffit de savoir qui vend, qui achète et on peut trouver ce que l’on veut. Troc injuste où ceux qui l’ont mis en place sont les seuls véritables gagnants. Des mauvaises rencontres on en fait, comme partout dans le secteur. Si vous vous attendez à ce qu’un soldat lève le moindre petit doigt pour vous aider, vous êtes foutus.

Si la plupart des ordures sont jetées directement dans l’espace certaines ont été entreposées ici. Parce que l’on pensait que cela pourrait servir. Un jour peut-être de nouveau. De vieilles pièces de vaisseau, des objets qui ne ressemblent plus à rien. Le temps n’a pas amélioré leur état et se dégage d’ici l’odeur pestilentielle de plastique carbonisés, de gaz toxiques. Il est presque insupportable de se mouvoir en ce lieu tant l’air est irrespirable. Si vous pensiez que les autres endroits du secteur étaient infâmes alors rien ne peut vous préparer aux vapeurs qui se dégagent de la décharge. Et pourtant quelques fous s’y risquent parfois. Pour échapper aux patrouilles, à un ennemi ou par cupidité. Il arrive d’y trouver objets et pièces intéressants qui réparés peuvent rapporter sur le marché noir.